Le Théo CABRERO du mois revient sur l'obsession du jeu vidéo de déambulation : reconstituer un univers urbain crédible. Une limite aussi ?
Nous sommes en septembre. Et qui dit septembre dit « Villes & Toiles » évidemment ! Et cette neuvième édition va une nouvelle fois placer la ville au cœur de sa programmation et même l’incarner. Oui, cette année, « je suis ma ville » !
Mais ce n’est pas pour autant que je vais changer de passion. Cet article parlera toujours de jeu vidéo et d’une licence bien particulière : Driver.
Car il y a beaucoup à dire sur le rapport ville / jeu vidéo. L’environnement urbain peut certes servir de simple décor dans l’étape de création, mais parfois ce décor se transforme en véritable enjeu narratif et ludique conditionnant directement le travail du game designer.
Driver en est un exemple concret. Commercialisé la première fois en 1999 par les studios Atari, cette série de jeux de voitures met le joueur dans la peau d'un policier très habile en conduite, appelé John Tanner. Driver transporte ainsi le joueur dans une aventure rythmée par de dangereuses missions séparées par des cinématiques, tout en suivant le cours de l'histoire de ville en ville.
La particularité et la singularité de ce jeu vidéo réside dans le fait qu’il s’agit de véritables villes re-modélisées et nommées telles quelles dans le scénario du jeu. Nous pouvons prendre pour exemple New York, Chicago, mais aussi Istanbul ou encore Nice.
Au lancement de la licence en 1999, les moyens techniques pour le développement étaient de fait plus restreints. En ce sens, le premier Driver conditionne son contenu autour d’un seul avatar jouable : une voiture. Tanner n’est nullement « actable », il apparaît uniquement dans les cinématiques. Le jeu vidéo prend donc des allures de déambulation dans de grands couloirs pixélisés. Pourtant, c’est bien ce travail de reconstitution urbaine (même limité techniquement) qui permet au joueur de déambuler dans un univers crédible et faisant un parfait écho à la force narrative et cinématographique déployée dans les différentes cinématiques.
Bien entendu, ce travail de reconstitution s’est amélioré au fur et à mesure de l’évolution de la saga, qui a bénéficiée des progrès techniques de l’industrie vidéoludique. Une industrie qui donne d’ailleurs de plus en plus d’importance à son univers et son décor d’interaction, comme en témoigne l’ensemble des Open World (ou « Monde Ouvert »). Véritable fer de lance de la nouvelle génération de console commercialisée depuis la fin 2013, les jeux vidéo Open World confirme l’envie des développeurs de repousser les limites de l’immersion en proposant au joueur des univers de plus en plus proches du réel : architecture, trafic, interactions, météo, cycles lumineux, société de consommation, nouvelles technologies… Les détails se multiplient au fur et mesure que le pixel s’efface.
Driver a justement travaillé sur cette importance du détail urbain à travers le quatrième épisode de sa licence, Driver : Parallel Lines sorti en 2006. En effet, le joueur incarne un hors la loi dans le New York des années 1970. Suite à un coup raté, votre personnage Terry Kid finit en prison pour en ressortir 28 ans plus tard. Les choses ont forcément changé… Le joueur assiste donc à l’évolution architecturale et sociétale d’une ville et qui conditionne en même temps l’expérience ludique. Car le joueur doit retrouver ses repères, identifier de nouveaux lieux, conduire de nouveaux véhicules… Une expérience assez originale pour être soulignée.
A l’époque où les jeux vidéo ressemblaient encore à des amas de pixels grossiers, Driver exploitait le pouvoir de l’imaginaire collectif à son extrême afin de plonger le joueur dans un univers crédible et construit sur des codes urbains.
Cet imaginaire est aujourd’hui alimenté par des rendus parfois proches du photoréalisme, où des équipes de production capturent et étudient des bâtiments entiers pour les reproduire numériquement.
On peut donc se poser la question des limites de ce travail de reproduction, à l’heure où le numérique a déjà rattrapé notre réalité.
En attendant, nous vous donnons rendez-vous le dimanche 27 septembre à partir de 14h pour un Ciné / Jeu vidéo exceptionnel aux Cinoches de Ris-Orangis : Driver sera de la partie, tout comme Mario Kart qui s’invitera sur écran géant pour un tournoi enflammé.
Car oui, la ville c’est aussi un jeu !
Théo CABRERO
s'intéresse à tout, découvre des pépites et allume la mèche..
PREFIGURATIONS est aussi une association evryenne.
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